Psy et hypnose : un duo incompatible ?
Une formation de psy très classique…
J’ai fait la psycho dans une université d’orientation psychanalytique, l’ULB. J’ai adoré. J’étais sûre que je suivrais la filière psychanalytique par la suite… Ce n’est pas du tout ce qui s’est passé.
En 1999, quand j’ai entamé ma première formation en hypnose, je l’ai gardée pour moi. À l’époque, suivre ce type de formation équivalait à peu près à entrer dans une secte, aux yeux des psychologues. Toute forme d’intervention, donc de technique, semblait suspecte au regard de la sacro-sainte neutralité bienveillante dont on m’avait abreuvée durant mes 5 années de psychologie.
Un·e psy, ça n’intervient pas. Ça hoche la tête avec bienveillance, ça ne montre aucune émotion, et surtout, ça ne FAIT RIEN. Sinon, comment être sûr·e de ne pas entraver le chemin thérapeutique du patient et de quitter sa posture d’écran neutre ?
Ma rencontre avec l’hypnose thérapeutique
Dans ma première formation en hypnose, avec Thierry Melchior, la proximité physique du thérapeute et du patient me heurtait. La forme de « manipulation » que constituait le langage hypnotique aussi. Cela me semblait incompatible avec ce que j’avais appris en tant que psychologue.
L’hypnose me fascinait… mais je ne pouvais pas encore la mettre en pratique. Accrochée à ma neutralité bienveillante, j’ai poursuivi mon parcours pro.
Le virage vers la systémie et la thérapie du changement
Je me suis formée à la systémique, contrairement à mes plans de départ. L’approche me semblait bien plus concrète. Et au contact de la vie, de mes propres séances de thérapie, et de celles avec mes patients, j’ai pris conscience d’une chose qui a totalement réorienté ma pratique : comprendre ne suffit pas. Même si c’est indispensable, ce n’est pas suffisant pour provoquer un changement durable.
J’ai moi-même suivi une thérapie analytique pendant 8 ans. J’ai compris plein de choses sur mes schémas… mais je me retrouvais face à la même impasse que mes patients : « Ok, j’ai compris… mais je fais comment maintenant pour changer ? »
Intégrer l’hypnose dans mon approche de psychothérapeute
C’est à ce moment-là que j’ai réintroduit l’hypnose dans mon travail systémique. J’avais un outil de changement thérapeutique assez fort. J’ai repris d’autres formations en hypnose, et c’est comme ça que j’ai enfin pu répondre aux patients qui me sollicitaient pour mettre en place de vrais changements.
Évidemment, cela m’a demandé de repenser entièrement mon cadre thérapeutique : la distance physique, le ressenti de manipulation, la posture du praticien…
Aujourd’hui, je propose un cadre clair et ajusté qui me convient. Je me présente comme une psychothérapeute du changement. Mon approche systémique nourrit la compréhension, et mes outils (hypnose, EMDR) servent l’action.
La distance physique varie selon les séances. Si mes patients le souhaitent, je me rapproche durant les séances d’hypnose ou d’EMDR. S’ils préfèrent garder de l’espace, aucun souci : j’approfondis autrement. J’ai pu remettre en perspective les injonctions à la neutralité bienveillante, pour proposer un accompagnement réellement utile.
Hypnose et manipulation : une fausse croyance ?
Je ne fais rien à la place des patients. Je reste une psychologue clinicienne. Pas de conseils directs, mais des exercices concrets. Pas d’injonctions, mais des outils pour s’autonomiser et avancer réellement.
Durant mes formations en hypnose, il arrive encore que des collègues psychanalystes me disent que l’hypnose leur semble manipulatoire. Je comprends leur point de vue. Mais soyons clairs : toute psychothérapie, lorsqu’elle vise le changement, est une forme de « manipulation ».
Le rôle du thérapeute est d’aider le patient à contourner les résistances naturelles au changement (homéostasie). Cette forme de manipulation ne doit jamais devenir de l’emprise. Il ne s’agit pas d’exercer un pouvoir, mais d’agir sur les représentations, les fonctionnements, les récits de vie.
L’hypnose thérapeutique est un outil stratégique, éthique, respectueux, qui répond à la demande du patient. Elle ne force rien, elle accompagne.
Conclusion : conjuguer psy et hypnose, c’est possible
Aujourd’hui, je suis pleinement en accord avec ma pratique. Je crois profondément que les gens n’attendent pas uniquement un miroir. Ils ont besoin de clés concrètes pour aller mieux.
Et vous, praticien.ne, psychologue, thérapeute ? Avez-vous dû faire évoluer votre cadre ? Que pensez-vous de l’idée que l’hypnose est une forme de manipulation ?